Nouvellement débarqué (mai 2012) dans le paysage du noir français, Patrick Philippart s'est déjà taillé une solide réputation d'auteur de polars. Les (més)aventures de son journaliste-enquêteur, Dimitri Boizot, suscitent l'intérêt d'un nombre toujours croissant de lecteurs.
Philippart pourrait se contenter de ce succès, mais voilà, c'est un auteur, un vrai, qui s'essaye à tous les genres. Et toujours avec le même bonheur - ce qui est agaçant pour les autres -, comme en témoigne sa Cohabitation interdite, parue en juin 2012.
Son secret ? Des histoires. Bien racontées. Bien écrites. Bien ficelées. Avec des personnages attachants. « Bien ficelé », « attachant »… avec tout ça, comment voulez-vous que le lecteur décroche ?
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Parlez-nous de vos livres. Quelles sont vos histoires, vos personnages, votre univers ?
À l'heure actuelle, je dispose de huit romans terminés et prêts à la
publication. Tous répondent à la même caractéristique : la priorité
accordée à l'histoire. Lorsque j'écris un roman, je pars toujours d'une
histoire, avec la volonté de distraire, d'amuser, de surprendre, de
captiver le lecteur, en évitant avec soin de l'ennuyer.
J'évite donc les digressions trop longues, les passages seulement
destinés à me faire plaisir. Lorsque j'écris, j'ai toujours en tête
l'objectif de ne pas ennuyer mes futurs lecteurs, mais de leur servir
une histoire bien ficelée, bien construite, avec des personnages
plausibles.
J'écris des polars, avec un héros récurrent baptisé Dimitri Boizot,
journaliste quadragénaire qui ressemble furieusement à Monsieur
Tout-le-Monde, avec ses problèmes quotidiens. Mais il peut aussi s'avérer
un redoutable enquêteur, qui ne « lâche jamais l'affaire ».
Mais j'écris aussi d'autres romans, très ancrés dans notre société
contemporaine, avec des personnages que l'on peut croiser chaque jour au
coin de la rue. Je crois beaucoup, en effet, au fait que, chez chacun
d'entre nous, existe une part de vie qui peut faire l'objet d'un roman.
Mon univers, c'est donc la France contemporaine, aussi bien parisienne que provinciale.
Si
je dois mentionner des auteurs que j'aime et qui, d'une manière ou
d'une autre, m'influencent certainement, je citerai en vrac Daniel
Pennac, Didier Van Cauwelaert, ou encore Romain Gary, y compris sous son
avatar Émile Ajar.
Depuis combien de temps publiez-vous vos romans en auteur indépendant ?
En
fait, j'ai découvert l'auto-édition numérique en avril 2012, dans un
article du Nouvel Observateur qui parlait d'Amazon. J'ai publié un
premier roman, Mortelles ambitions, en mai 2012, et j'ai eu la chance de
connaître aussitôt le succès avec plus de 3 000 exemplaires vendus.
Depuis, j'ai édité sur Amazon trois autres romans, dont un autre polar
mettant en scène Dimitri Boizot, et qui suit les traces du premier en
terme de ventes.
Qu’est-ce qui vous a conduit à l’indépendance ?
C'est,
bien sûr, le fait que j'ai essayé depuis quelques années d'intéresser
des éditeurs classiques à mes romans, sans le moindre succès. Avec,
notamment, des manuscrits retournés sans avoir été lus, ce qui est très
frustrant.
J'ai donc tenté l'essai d'édition numérique, pour voir... et j'ai
découvert, à ma grande surprise, qu'il existait désormais un grand
nombre de lecteurs de livres numériques, grâce à la rapide
multiplication des liseuses et des tablettes. Aujourd'hui, je suis
vraiment persuadé que l'édition numérique est l'avenir de l'édition.
Publiez-vous exclusivement en numérique ou également en version brochée ? Comment cela se passe-t-il ?
J'ai
également édité deux de mes romans, Mortelles ambitions et Une Année
prodigieuse, en version brochée, également disponibles sur Amazon.
J'ai moi-même fait tout le travail éditorial : couverture, quatrième
de couverture, mise en page, relecture... C'est astreignant, mais cela
permet, en même temps, de mieux comprendre en quoi consiste vraiment le
travail d'un éditeur, avec la volonté de produire un roman irréprochable
à tous points de vue.
Quels avantages voyez-vous à la publication en indépendant, comparativement à l’édition traditionnelle ?
Le
grand avantage est, évidemment, la liberté totale dont on dispose
lorsqu'on écrit. Ici, il n'existe aucune contrainte, ni de fond, ni de
forme.
Le second avantage réside dans le contact direct que l'on peut
avoir avec ses lecteurs, via les commentaires en ligne ou les mails
reçus de certains lecteurs ou de certaines lectrices.
Quels sont les inconvénients ?
Personnellement, à côté de ces avantages, je ne vois
aucun inconvénient à la publication en indépendant, mais je comprends
bien que certains auteurs puissent être rebutés par l'important travail
éditorial à fournir soi-même pour obtenir un roman éditable dans de
bonnes conditions.
Quelles difficultés rencontrez-vous, d’ordre technique ou autre ?
Très franchement, jusqu'à présent, je n'ai rencontré aucune difficulté d'aucune sorte.
Si un éditeur traditionnel vous contactait,
seriez-vous prêt à travailler avec lui ? Envisagez-vous de contacter
vous-même un éditeur ?
Non, je n'envisage plus de contacter moi-même un éditeur, ma situation actuelle me satisfait parfaitement.
En revanche, il est sûr que si un éditeur traditionnel me
contactait, mon ego, mon amour-propre en seraient flattés : l'édition
classique reste, aujourd'hui encore, le modèle rêvé, voire fantasmé par
les candidats écrivains.
Selon vous, quel regard portent les professionnels
du livre – éditeurs, auteurs, libraires, critiques, journalistes – sur
les auteurs indépendants ? Et les lecteurs, qu’en pensent-ils ?
Je pense qu'à l'heure actuelle, les professionnels du livre
ont encore trop tendance à ignorer les auteurs indépendants, quand il ne
s'agit pas de mépris pur et simple. Avec cette pensée sous-jacente : si
ces auteurs sont indépendants, c'est parce qu'ils n'ont pas trouvé
d'éditeur, et s'ils n'ont pas trouvé d'éditeur, c'est qu'ils ne sont pas
bons.
Il est sûr qu'on trouve actuellement le pire et le meilleur en
auto-édition numérique. Mais si l'on se donne la peine de chercher, de
fureter, on peut découvrir des auteurs qui ont au moins autant de
qualités que les auteurs traditionnels.
Je pense que les éditeurs traditionnels devront, de toute façon,
réviser tôt ou tard leur manière de penser, parce que l'édition
numérique est appelée à se développer et que le modèle économique
éditorial va évoluer en conséquence.
De quelle manière le courant indépendant
pourra-t-il gagner ses lettres de noblesse en littérature ? Comment
voyez-vous son évolution ?
Ces lettres de
noblesse se gagneront naturellement si les auteurs qui ont recours à
l'auto-édition numérique soignent leurs productions et affichent la volonté de
fournir des produits parfaits, débarrassés, par exemple, des fautes
d'orthographe et de grammaire dont trop de livres auto-édités sont
actuellement jonchés. On se rend bien compte, à la lecture des
commentaires en ligne des lecteurs, que ceux-ci sont très sensibles – à
juste titre – à cet aspect des choses lorsqu'ils lisent un roman
numérique.
Accédez à la bibliographie complète de Patrick Philippart.
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