Pour traduire Lovecraft, David Camus est l’homme de Providence
On consacre rarement une
chronique littéraire sur un ouvrage traduit au travail du traducteur. Normal,
puisque dans la plupart des cas il s’agit d’œuvres inédites pour lesquelles
l’important est de faire découvrir le texte. Voici là une magnifique
opportunité de changer la donne, avec cette nouvelle traduction des Montagnes hallucinées, de H.P.
Lovecraft, parue aux éditions Mnémos. Le passeur de mots, cette fois, s’appelle
David Camus. Lui-même auteur, à qui l’on doit, entre autres, le cycle du Roman de la Croix (Robert Laffont), il a déjà traduit du même
Lovecraft Les Contrées du rêve (toujours chez Mnémos). Selon
Camus, Lovecraft est l’écrivain de l’indicible, et pour le saisir on doit
regarder comment il n’écrit pas ! Un cauchemar pour tout traducteur
normalement constitué, en somme. Il est vrai que Lovecraft fait du cauchemar sa
matière première. Mais David Camus ne voit dans ce défi à relever qu’un doux
rêve de jeunesse. Des années, qu’il fréquente son auteur fétiche (oui, on peut
parler de fétichisme, à ce stade) pour parvenir à ce degré de fusion avec lui,
pour parler aussi bien son langage ô combien particulier, pour en éviter les
contresens et les pièges dans lesquels d’autres tombent si facilement. Camus a
même créé son dictionnaire lovecraftien (à quand sa parution ?), les
récits ne lui suffisaient plus. Laissons-nous donc embarquer par ce guide de
haut vol, par ce maître ès Lovecraft, dans les voyages que nous proposent ces
six nouvelles. Voyages de première classe dans les contrées de la peur, au bout
de l’horreur, avec les sublimes « L’Appel de Cthulhu », « Les
Montagnes hallucinées » et « Dans l’abîme du temps ». On croyait
avoir lu ces textes, mais c’était avant de les avoir lus préfacés et traduits
par David Camus.