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1 novembre 2014

Mon immersion dans le Darknet [2]

Le Darknet est la face cachée du Net et représente la partie immergée de l'iceberg

Écrivain novice dans le domaine, je vous invite, à travers une série d'articles, à suivre mon parcours dans les profondeurs de la Toile interdite. Ou comment, pour les besoins d'un livre, j'ai accepté de courir des risques.


Le Darknet, nouveau terrain de jeu – dangereux – pour les ados ?
Mais d'abord, rendons à César ce qui appartient à César. Qu'est-ce qui m'a donné envie de me  plonger les mains dans le cambouis ? Qu'est-ce qui m'a poussé, moi le non-geek assumé, déjà un peu largué par Twitter et Instagram, à m'intéresser à quelque chose d'a priori aussi complexe que le Darknet ? Complexe car totalement méconnu pour bon nombre. Réponse : mon fils.
C'était au cours d'un petit déjeuner, un week-end. Entre deux bouchées de porridge, il me sort : « Eh, dis donc, tu savais qu'une grande partie du Net était secrète ? » Pile au moment où je m'apprêtais à lui demander si ses révisons de maths avançaient correctement pour son interro du lundi.


Que risquent les plus jeunes à surfer sur le Darknet ?

— Comment ça, secrète ? je questionne.
— Ben ouais, secrète, quoi.
— O.K., tu peux développer ? Tu sais que tu passes ton bac français dans deux ans ? Il faudrait que tu commences à savoir construire des phrases.
Il soupire et me regarde avec des yeux qui me traitent silencieusement de vieux con. Ou de gros relou. Enfin, un truc du genre. Mais comme il aime bien son has-been de père et qu'il me prend en pitié, il consent à éclairer ma lanterne : « Ça s'appelle le Darknet, ou le Deepweb, et on y accède par un logiciel particulier. Je sais pas si je peux l'installer sur mon ordi, il paraît que c'est illégal et que des mecs se sont déjà fait choper par le FBI, aux États-Unis. T'as pas entendu parler de ça ? »
Mon cool spirit de père post-soixante-huitard qui a goûté aux joies du cannabis, de la libération sexuelle et d'autres trucs pas racontables s'affiche subitement aux abonnés absents. Je me mue très nettement en patriarche gaulliste, éventuellement pompidolien, et je bloque sur « Darknet », « Deepweb », « illégal », « choper », « FBI ».
— Comment es-tu au courant de ce truc ? réponds-je à une question par une autre question.
— Bah, c'est avec des potes, on en discute.
Je sais que, dans sa bande, mon fils compte une bête en informatique, un pur geek. Appelons-le X. En vieux requin, je procède par cercles concentriques.
— Et X., il est allé sur le Darknet ?
— Non, mais il aimerait bien. Pour voir, tu vois.
— Je vois, tu vois. Et vous parlez de ça, en ce moment, avec tes potes ?
— Carrément. Mais la galère, c'est ce logiciel à installer et le risque de te faire gauler par les flics.


Pour protéger mon fils surfeur des squales du Darknet, c'est moi qui avance en cercles concentriques. 

— Pourquoi se faire gauler ? Qu'y trouve-t-on, sur ce Darknet ?
— Déjà, de la drogue, ça c'est sûr. Il y a un site qui s'appelle Silkroad, c'est un genre d'Amazon de la drogue. Tu choisis ton produit, tu le commandes et tu te le fais livrer. Comme sur Amazon. Je crois qu'il y a des armes, aussi.
Et aussi de la (pédo)pornographie, de la violence, de l'horreur, etc. Je n'y connais rien, donc j'émets des hypothèses, mais dans l'ensemble je crois que j'ai pigé. Je me fais ma petite idée.

La peur n'évite pas le danger, le dialogue si.
J'essaie de redevenir le père post-soixante-huitard ouvert à tout et dans le dialogue plutôt que dans la punition que j'ai toujours été, me semble-t-il, avec mon fils. J'avale une gorgée de café avec une nonchalance qui aurait rendu Steve McQueen fou de jalousie et repose mon mug d'un air entendu du mec qui en a vu d'autres. Puis je  lance, d'un ton léger :
— Bon, honnêtement, quel intérêt ? Si tu veux fumer de l'herbe, on peut en parler, tu le sais. Ou si tu veux fumer tout court, d'ailleurs.
— Ouais, je sais, t'inquiète. Mais franchement, je veux pas fumer. Quand je vois comment les fringues des fumeurs daubent la clope, je te jure que ça donne pas envie.
— O.K. Pour le sexe…
Il sourit d'un air entendu du mec qui en a vu d'autres qui me rappelle quelque chose.
— Pas besoin du Net non plus, précise-t-il.
— O.K., alors les armes…
— Non plus. Vraiment rien de tout ça. C'est juste la curiosité.
— Je comprends. Mais tu es si pressé de contempler la laideur du monde ? Tu ne préfères pas te concentrer sur ses beautés et attendre un peu pour le reste ? Et puis, pense à ton vieux père. Si tu te fais repérer par les flics, c'est moi qu'on embarquera, puisque tu es mineur.


Parler des dangers du Darknet plutôt que d'en interdire l'accès (impossible, de toute façon) ou se voiler la face.

Il se marre, et moi je respire. À demi. Je sais que, pour l'instant, il ne fera rien. Mais qu'il attend quand même quelque chose. Une réponse. Il est d'esprit curieux, je l'ai élevé en ce sens, je ne peux pas le lui reprocher maintenant.
— Tu sais ce que je vais faire ? je lui demande. Je vais me renseigner. Je vais y regarder d'un peu plus près et te dire ce qu'il en est réellement.
— Cool. C'est vrai, tu vas le faire ?
— Carrément, mec, je vais le faire. Et je te dis. O.K. ?
— Ouais.
Il expédie son petit déj. et redescend dans sa chambre. Moi je reste pensif un long moment. Je sens confusément que je suis au début de quelque chose. Je ne sais pas encore quoi exactement. Un voyage, une aventure… un roman. C'est pareil.
(À suivre…)

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L'avis des lecteurs

7 commentaires:

  1. Merci Marilyn,
    C'est promis, la suite arrive samedi 8 novembre. Des commentaires tels que le vôtre m'encourage à poursuivre.

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  2. Ça donne envie d'en savoir plus. À samedi donc !

    P. Grabt

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  3. Article très intéressant avec de belles touches d'humour et des illustrations bien choisies !

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  4. Merci, Paul.
    L'épisode 3 arrive le 16 novembre en fin d'après-midi.

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