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27 février 2013

Jean Malaquais, Jean du voyage


Des êtres de chair et de sang s’apparentent parfois à des personnages d’encre et de papier. Ainsi en est-il de Vladimir Jan Pavel Israël Pinkus Malacki ; Jean Malaquais, en français. Car, apatride dont la littérature demeure le seul pays, il élit la France comme terre d’asile, après avoir quitté sa Pologne natale à 17 ans, sillonné le monde, fui le nazisme. Mais la France lui refuse une nationalité que lui accordent les États-Unis, à lui, le « métèque », le juif gauchiste ; belle ironie ! Geneviève Nakach, dans une biographie qui se dévore comme un livre d’aventures, retrace le(s) parcours de cet insoumis, que ni la pauvreté ni l’obligation de gagner durement son pain par mille moyens n’empêcheront d’écrire. Styliste incomparable comparé à tort à Céline, quand Kafka tiendrait mieux le rapprochement, auteur de nombreux textes, il ne publie que trois romans : Les Javanais (Renaudot 1939), Planète sans visa et Le Gaffeur. La guerre a-t-elle emporté son souffle en emportant son frère, exterminé en camp, figure récurrente de ses récits, dont il murmurera le nom sur son lit de mort ? Quelques jours avant, éternel insatisfait, il aura achevé la réécriture de ses romans, 60 ans après la première édition. Molière meurt en scène, Malaquais en écrivant ; une fin aussi romanesque que ses débuts, où fauché et transi de froid à Paris, il se réchauffe à la bibliothèque Sainte-Geneviève. Là, il lit un article consternant de Gide, sur la misère. Il lui adresse une lettre, les deux hommes se voient, s’expliquent, deviennent amis. C’était l’époque qui voulait ça, diront certains. Pas d’accord. Ce sont les hommes qui font l’époque, et non le contraire. Sinon, c’est qu’il n’y a plus d’hommes.

Malaquais rebelle, de Geneviève Nakach, cherche-midi, « Documents », 348 p., 18 €.

24 février 2013

Andrea Japp : un auteur indépendant… et rebelle


Andrea Japp est un auteur prolixe et inspiré de nombreux romans policiers. Ses récits, aussi bien contemporains – série Diane Silver – qu'historiques – série Druon de Brévaux – sont tous disponibles chez de grands éditeurs tels que Le Masque, Calmann-Lévy et Flammarion. Et lorsqu'elle n'écrit pas, elle traduit les polars de Patricia Cornwell mettant en scène la célèbre Kay Scarpetta. On lui doit aussi des scénarios de téléfilms et de BD.
Auteur connu et reconnu, donc, Andrea Japp a cependant tenté dernièrement l'expérience de la publication indépendante et s'en explique.

DR
Vous êtes l’auteur d’un grand nombre de romans publiés chez des éditeurs traditionnels, qui remportent le succès que l’on connaît. Cependant, vous avez récemment publié un recueil de nouvelles en auteur indépendant, Entre sourires et larmes. Qu’est-ce qui vous a conduite à cette démarche ?
D’abord, la curiosité. Des copains auteurs avaient sauté le pas et m’ont encouragée à les imiter. J’ai traîné, songeant que j’allais faire un essai « quand j’aurais un moment ». Puis est arrivée la loi sur les indisponibles1, et j’avoue que j’ai été très agacée par ses conditions. Autant je la jugerais bénéfique en version opt-in2, autant sous la forme adoptée elle m’a paru abusive. Seul un auteur (ou ses ayants droit) est à même de décider si l’un de ses anciens titres doit être réédité en numérique. D’ailleurs, les maisons d’édition ont proposé des avenants à leurs auteurs pour le passage en numérique de textes déjà anciens, l’auteur étant alors libre de refuser. C’est de cette façon que les choses doivent se dérouler. Face à cette loi, la publication indépendante m’a alors semblé la solution idéale pour que certains de mes textes, qui ne sont plus commercialisés sous forme papier, ne tombent pas dans la catégorie « indisponible ». En réalité, ce fut une rébellion de ma part. 
Je suis également partie d’une conviction : le livre papier ne disparaîtra pas et c’est heureux. Il génère un attachement très sentimental, physique, presque sensuel. On veut le voir dans une bibliothèque. On veut constater, à l’usure de sa tranche, à quel point on l’a aimé et lu. En revanche, le numérique est appelé à un énorme succès. Ca ne prend pas de place, ça se transporte facilement et (dans mon cas) autant il peut s’avérer difficile de jeter un livre-papier, même mauvais, autant l’effacer est aisé. En plus, c’est moins cher.
L’expérience était donc très tentante !

1 Cette loi a été adoptée par l’Assemblée nationale, dans la nuit du 22 au 23 février 2012, mais n’est toujours pas appliquée, car elle est tout simplement anticonstitutionnelle. En résumé, elle autorise la numérisation d’œuvres classées indisponibles (c’est-à-dire qui ont cessé d’être commercialisées par les éditeurs), en vue d’une nouvelle exploitation commerciale sous la forme de livres électroniques, et ce sans en demander l’autorisation aux auteurs ou à leurs ayants droit. Pour plus d’informations, vous pouvez consulter le texte de loi tel qu'adopté. Et voici deux articles très clairs parus dans ActuaLitté : Numérisation des œuvres indisponibles : auteurs spoliés, droit bafoué…" et "Œuvres indisponibles : pourquoi la loi ne passera jamais".  
2 Dans la version opt-in, les auteurs et les ayants droit disent s’ils sont d’accord ou non pour que l’on procède à la numérisation de leurs œuvres. S’ils n’effectuent pas cette demande, les œuvres ne sont pas numérisées. Dans la version opt-out (la version adoptée, bien sûr !), les œuvres sont numérisées, et les auteurs et ayants droit disposent d’un certain délai pour exprimer leur désaccord. Ce qui implique pour eux d’être informés que leurs œuvres ont été numérisées. En gros, c’est à eux d’être vigilants.

Quels avantages voyez-vous à publier ses livres de façon indépendante, comparativement à une publication par un éditeur traditionnel ?
Dans mon cas, pouvoir rééditer un texte qui n’est plus exploité, en le réécrivant.
Plus généralement et pour des auteurs qui peinent à se faire éditer par des éditeurs traditionnels, c’est aussi sans doute le meilleur moyen de proposer leurs textes aux lecteurs.

Quels sont les inconvénients ?
Selon moi, l’édition indépendante, numérique, c’est-à-dire n’exigeant pas de mise de fonds importante, aura les défauts de sa principale qualité – la liberté de publier. On risque un afflux de mises en ligne de textes inintéressants (et il y en a) ou de textes qui n’auront pas été convenablement édités. Les lecteurs de livres numériques indépendants se plaignent déjà des fautes de français ou d’orthographe, voire des couacs de construction, même lorsque le texte est de qualité. De fait, une œuvre de fiction n’est pas seulement un imaginaire, une histoire, des personnages, c’est également de la technique. Il ne faudrait donc pas que le lecteur se décourage et finisse par ne sélectionner que les auteurs qu’il connaît. On parviendrait alors à l’inverse du résultat espéré.

Avez-vous rencontré des difficultés particulières, d’ordre technique ou autre ? Que pensez-vous des différentes plates-formes des librairies en ligne ?
Non, j’ai même été sidérée par la simplicité du procédé. Cela étant, je ne connais que le KDP d’Amazon et ne puis donc pas juger des autres plates-formes. Dans mon cas, l’expérience a été très concluante, de bout en bout, et j’en garde un excellent souvenir.

Avez-vous une idée du regard que portent les professionnels du livre – éditeurs, auteurs, libraires, critiques, journalistes – sur les  auteurs indépendants ? Et les lecteurs, qu’en pensent-ils ?Je ne peux répondre qu’en me fondant sur ma petite expérience.
Les auteurs que je connais ont, le plus souvent, à peu près mon âge, ne sont pas tous à l’aise avec un ordinateur (loin s’en faut). Ils s’imaginent, à tort, que mettre un texte en ligne exige une licence d’informatique. Témoin, cette amie qui venait de se faire refuser pour la quatrième fois un texte et qui m’a rétorqué : « Mais je ne sais même pas ce qu’est un pdf. »
Les lecteurs que je rencontre, lors des salons par exemple, sont très intéressés, mais un peu inquiets, pour les raisons que j’évoquais. S’agissant de lecteurs de polars, donc de très gros lecteurs en général, l’aspect du prix est bien sûr un atout considérable à leurs yeux. Cela étant, on sent de leur part une hésitation, sur le mode : « Mais comment savoir si c’est un bon roman, bien écrit ? » C’est là que les journalistes et les critiques ont un rôle considérable à jouer.
Bon, c’est une interprétation très personnelle, mais je ne pense pas du tout que les éditeurs traditionnels voient d’un mauvais œil les auteurs indépendants. Une maison d’édition est aussi pragmatique. Après tout, si un auteur indépendant connaît un succès fulgurant, et cela s’est vu, l’éditeur peut faire une proposition derrière. Les liens auteurs-éditeurs ont changé, avec le monde. Les « mariages à vie » entre un auteur et son éditeur existent de moins en moins. « Récupérer » un auteur ou au contraire le voir partir est devenu assez banal pour un éditeur. Au fond, les auteurs indépendants sont une sorte de vivier de talents potentiels, et je suis bien certaine que les éditeurs en sont conscients.

À votre avis, de quelle manière le courant indépendant, en littérature, pourra-t-il gagner ses lettres de noblesse ?
En livrant de bons textes aux lecteurs, quoi d’autre ? Étant moi-même grosse lectrice, je passe sur un mauvais film, un mauvais restaurant. En revanche, je suis vraiment déçue, parfois furieuse, lorsque je tombe sur un mauvais roman ou, pire, un roman bâclé.

Comment voyez-vous l’évolution de ce mode de publication ?
J’espère véritablement qu’il donnera leur chance à des auteurs qui n’ont pas trouvé d’éditeur traditionnel. Il existe d’excellents textes, atypiques, qui ne trouvent pas toujours d’éditeurs. Pour le reste,  j’en suis au stade du point d’interrogation. Je peux, bien sûr, me tromper, mais selon moi l’alternative est simple : ou l’on va vers un grand bordel, avec une multitude de textes de qualité très variable, dont certains décevront et rendront les lecteurs méfiants vis-à-vis des indépendants qu’ils n’ont jamais lus, ou les auteurs deviennent éditeur de leurs ouvrages. Il s’agit d’un véritable métier, qui apporte énormément à un livre. Cela suggère un regard objectif et critique sur son propre travail – « l’œil » de l’éditeur traditionnel – et ce n’est pas simple. Cela suggère également derrière une « machine » qui, dans une maison d’édition traditionnelle, va de la préparation de copie aux corrections orthographique et typographique, en passant par la couverture et la mise en page, et bien sûr, très important, par la promotion. Au fond, il faudrait que se créent (mais peut-être est-ce déjà le cas) des sortes de bureaux de préparateurs et de correcteurs pour les auteurs indépendants.

Pouvez-vous nous présenter Entre sourires et larmes ?
Entre sourires et larmes était donc une expérience pour moi. Mes titres sont maintenant proposés en numérique par mes éditeurs, mais je n’avais jamais mis « la main à la pâte » en la matière.
Concernant le recueil : il s’agit de nouvelles, souvent polar, parfois un peu fantastiques, entre humour noir et noir tout court. Deux d’entre elles étaient parues chez un tout petit éditeur, qui a disparu il y a bien longtemps de cela. J’ai donc complètement réécrit ces deux nouvelles en en créant d’autres. Ce sont des instantanés d’humanité, parfois terriblement attachante, parfois exaspérante, voire meurtrière.

Quels sont vos projets littéraires ? Publierez-vous votre prochain livre en auteur indépendant ? Si non reviendrez-vous à ce mode de publication ?
Mon prochain roman, « In anima vili », clôt la série des Mystères de Druon de Brévaux. Il sortira en mai 2013. En octobre sortira le 3e volume des Enquêtes de M. de Mortagne, bourreau. J’attaque ensuite un projet qui m’occupe l’esprit depuis deux ans, avec un retour au thriller très contemporain. Le tout chez Flammarion.
Ah oui, je vais récidiver ! Je n’éprouve aucune angoisse ou animosité envers les ordinateurs ! Cette année, je compte mettre en ligne deux textes réécrits. Ma vision a changé. De surcroît, lorsque comme moi on développe aussi une veine « polar scientifique », il est ahurissant de rééditer des textes dépassés parce que la science et la technologie ont tant évolué en dix ans. Il n’y avait pas de téléphone portable, ou très peu, à l’époque où je les ai conçus, c’est dire ! Il s’agit, pour moi, du véritable privilège de cette forme d’édition. Mais je songe aussi à une veine « young adults », comme on dit dans l’édition, à cheval entre la science-fiction et le polar.

Consultez 
la bibliographie d'Andrea Japp.

22 février 2013

Un auteur indépendant se présente : Linden Oliver

La rubrique « Un auteur indépendant se présente » est un espace d’expression et de visibilité pour tout auteur indé qui le souhaite. Ici, chacun a carte blanche pour parler de ses œuvres, de son univers, de son parcours, de ses projets, et de l’édition indé.
De ça et du reste, puisque l'indépendance, c'est la liberté.
Merci à Linden Oliver pour sa contribution.


© Linden Oliver
Mon parcours et mon univers littéraire
J’écris depuis que je sais tenir une plume ; à six ans je réécrivais avec mes mots et mes fautes d’enfant les contes et les légendes que l’on me racontait. Selon une expression que beaucoup d’auteurs utilisent naturellement, j’ai été biberonnée aux romans de fantasy que lisait et me racontait ma mère, à la mythologie antique, aux légendes médiévales et à diverses histoires du monde (les contes d’Henri Gougaud par exemple). Écrire était déjà une telle évidence ! Mais je ne crois pas qu’il s’agisse d’un don inné. L’astuce, c’est de ne jamais perdre sa capacité à rêver, et d’avoir du courage. Beaucoup de courage ! J’aurais très bien pu abandonner l’écriture et me consacrer à autre chose, la natation par exemple. Mais non, il est des destins qui vous collent plus à l’âme qu’à la peau et qui, je crois, vous poursuivent de vie en vie jusqu’à ce que vous les réalisiez. C’est ce que j’ai compris quelques années plus tard, lorsque mon père est décédé. Écrire a été un moyen de survivre et d’exprimer ma douleur. J’écrivais car je ne pouvais ni pleurer ni saigner ; j’étais à ce point stupéfiée, figée par ce deuil titanesque, qu’écrire était la seule chose qui faisait encore vibrer la corde triste de mon cœur, alors que le monde autour me paraissait si vide, dépeuplé, et ne faisait qu’attiser ma frustration et ma colère. Entre mes 13 ans et mes 18 ans, je n’avais qu’un but : finir ce premier roman et ne pas me « foutre en l’air » tant que cela n’était pas terminé. Alors oui, écrire m’a sauvé la vie. En organisant une première œuvre intitulée la Seconde Guerre des dragons, je me suis construite, j’ai fait le tri en moi-même, transformant astucieusement de lourds fardeaux en héritage radieux. Il a fallu que je sois un temps renfermée sur moi-même pour pouvoir m’ouvrir aux autres. Mais n’est-ce pas le propre de l’adolescence et de tout travail intellectuel et psychique ? Ce qui était un refuge et un garde-fou contre mes pulsions de destruction est maintenant un moyen de transmettre ma force, ma lumière et mon expérience à d’autres. C’est aussi toujours un exutoire, un espace d’expérimentation de tous les possibles !
 Je me suis lancée dans les études sans trop savoir quel métier faire, mais avec l’idée ferme que le savoir acquis serait profitable, voire indispensable, pour mon travail d’écriture. Les lettres modernes, l’histoire de l’art et enfin la psychologie clinique m’ont apporté une grande rigueur d’élaboration et de rédaction, en plus d’avoir élargi ma culture et ma compréhension de l’homme et du monde. Les compétences de mon compagnon en histoire du droit me sont également très utiles. Je mets un point d’honneur à ce que l’univers de mes romans soit construit, cohérent et vivant. Même s’il s’agit de fantasy, je ne peux faire sans une dose de réalisme et de réalisme sourcé, car pour moi l’esprit doit avoir un point d’ancrage solide pour pouvoir s’évader librement. Enfin, la mort de mon père et mon expérience de mort imminente m’ont ouverte à une quête lumineuse de spiritualité, et tous mes romans sont en lien avec la mort, l’au-delà et le sens de la vie. Ces réflexions sur les rapports entre les êtres humains et sur la spiritualité permettent de donner à mon univers une profondeur et une certaine originalité. J’espère faire rêver le lecteur en décrivant à la fois la beauté et la fragilité du monde, la couleur des sentiments et l’essence des hommes.

Mes influences
Côté romans et auteurs de référence, j’ai été très influencée par Anne Rice et sa saga sur les vampires ; j’en retiens toutes les descriptions sublimes, la sensualité des personnages et la finesse des dialogues et des réflexions philosophiques. Margaret Weis et Tracy Hickman, puis Anne McCaffrey, sont à l’origine de ma passion pour les dragons. J’ai lu presque tous les Royaumes oubliés et les Lancedragon. Mercedes Lackey, tient une place privilégiée dans mon cœur avec sa trilogie des Flèches de la reine. Marion Zimmer Bradley, avec ses Dames du lac est également à citer ; ses personnages féminins et forts ont sans doute inspiré les miens. Pour l’humour, c’est Terry Pratchett et ses Annales du Disque-Monde qui ont mes faveurs. Je n’ai pas fini de lire le Seigneur des anneaux, mais il est clair que ma vision des elfes est issue de celle de Tolkien. Enfin, Robin Hobb et son cycle de L’Assassin royal sont à la naissance de mon roman Les Pèlerins d’Yssel et ont contribué à la maturation de mon style écrit : comment ne pas être charmé et inspiré par une écriture aussi mélancolique ? Dans une catégorie plus « classique », je suis toujours subjuguée, depuis mon enfance, par le Roman de la momie, de Théophile Gautier, ainsi que par les Fleurs du mal de Baudelaire.

Mon premier roman en auteur indépendant :
« Les Pécheurs » est le premier tome d’une saga intitulée Les Pèlerins d’Yssel. Ce n’est pas mon premier écrit, ni mon premier roman, mais c’est celui qui méritait une édition pour tout le travail dépensé : un vrai travail d’écriture et non plus un simple épanchement d’âme. C’est l’œuvre d’une certaine maturité, un travail sur plusieurs années qui se construit et vit en même temps que moi. Je l’ai commencé en 2007, lorsque la lecture de L’Assassin royal de Robin Hobb et la musique Nara du groupe ES Posthumus se sont télescopées ! Étrange alchimie qui a donné naissance à cette formidable aventure ! L’élaboration et la rédaction se sont doucement faites entre mes cours de psychologie et mes nuits de surveillance en internat.
Les Pécheurs se déroule sur 25 chapitres (plus de 750 pages en format imprimé !).  Roman de fantasy s’inscrivant dans un univers médiéval, c’est une fresque épique dans laquelle des destinées héroïques combattent, s’aiment ou se déchirent dans un cadre grandiose. L’histoire nous immerge dans un monde complexe, sensuel et fabuleux, mais qui menace aussi de vaciller dans le néant. Embarqués dans une véritable course contre la fin des temps, les personnages devront puiser en eux le courage et les forces nécessaires pour sauver les êtres qui leur sont chers ou survivre à leur disparition.
Mon personnage principal est Moéva d’Arézar, célèbre mercenaire approchant la quarantaine, général à la retraite (forcée), l’antithèse de toutes ces charmantes héroïnes littéraires que l’on croise à la pelle. Je ne voulais pas d’une héroïne principale lisse et parfaite, maîtresse en arts martiaux et qui a réponse à toutes les énigmes qu’on lui propose. Je voulais écrire avec un personnage qui me dérangerait, qui saurait me bousculer. Je désirais pouvoir déposer mes peurs et mes angoisses dans ce personnage, et m’émerveiller de le voir faillir ou vaincre. Moéva me permet d’exploiter les thématiques et les questionnements du handicap, de la maternité, de la peur d’être soi-même et de l’attachement à l’autre, de la confrontation aux hommes et à leurs lois, du désir de paix et de mourir, et enfin du sens et du fardeau de la Vie et de la Foi. Têtu et insoumis, ce personnage me réserve bien des surprises et m’a déjà plongée dans de vives complications ! Il m’est déjà arrivé qu’elle choisisse de prendre une autre direction que celle imposée par mon plan. Elle me déroute et me fascine autant que les autres héros qui croisent sa route. C’est une râleuse attachante, une solitaire au grand cœur, une passionnée qui a horreur de l’injustice. Et si elle toise les étrangers de son air sombre, ce n’est que pour mieux leur dissimuler sa fragilité intérieure et les multiples fêlures de son âme.

Mon parcours d’auteur indépendant et ma vision du courant indé
Après avoir bien protégé mon œuvre et commandé une couverture auprès d’une illustratrice professionnelle (la talentueuse Clémence de Chambrun), j’ai contacté toutes les maisons d’édition spécialisées dans la fantasy et le médiéval fantastique en France (sauf une célèbre en qui je n’avais pas... confiance, par rapport notamment à mon expérience lors du Salon du Livre à Paris). J’ai attendu patiemment que les délais de réponses soient écoulés avant de me lancer en numérique.
Sur 15 maisons à qui j’ai envoyé mon manuscrit, j’ai eu 4 réponses : 2 m’ont signalé poliment que mon roman n’était pas dans la veine de ce qu’elles recherchaient actuellement (Ah, bon ? Hum... Bah, au moins elles n’ont pas dit clairement que c’était nul ^^), et les 2 autres se sont montrées enthousiastes quant au potentiel commercial de mon œuvre, et m’ont directement envoyé un contrat, mais sans garantie de publier la suite de l’histoire et ajoutant à cela une participation de ma part de 3 500 € à 3 800 € pour les frais de couverture, de maquette et de correction. J’avoue avoir envoyé mon manuscrit à ces 2 maisons-ci par erreur ; si je n’ai pas retenu leur option pour publier mon œuvre, que celle-ci ait attirée l’attention d’un comité d’édition m’a mis du baume au cœur. Mais pas à ce prix ! Je me suis déjà ruinée pour finir ce premier tome et le diffuser auprès des éditeurs, stop !
Sans autres réponses, et grâce aux conseils et aux encouragements de ma chère amie Eva Liebermann, je me suis alors tournée vers le numérique et l’édition en auteur indépendant. Car pour moi, il n’était pas question que je renonce à un rêve d’enfant. J’avais écrit les premiers tomes des Pèlerins d’Yssel pour qu’ils soient publiés, pour partager mon univers, et je n’allais certainement pas revenir là-dessus. J’ai donc décidé de profiter des opportunités que nous offraient la vie et les nouvelles technologies. Si l’on ne peut franchir un obstacle, il faut le contourner ! Petit à petit, j’ai réalisé qu’être auteur indé m’apportait un avantage indéniable : rester maîtresse de mon œuvre. Comment mieux coller à ma personnalité ? Financièrement, je m’y retrouve : je suis passée par un célèbre distributeur gratuit, ce qui me permet de rendre mon œuvre accessible à un prix moindre qu’en libraire (pour un format de pages équivalent). Juridiquement et administrativement, moi qui ne suis pas un foudre de guerre dans ces domaines-là, je suis tout à fait satisfaite, car il y a le moins de démarches possibles. De plus, je peux à tout instant mettre à jour le contenu de mon roman, afin de corriger une coquille par exemple. Être un auteur indépendant est pour moi le prolongement naturel de mon travail et de ma philosophie d’écriture : c’est la liberté d’être soi-même et le plaisir de partager sans prise de tête !
Mon œuvre étant maintenant disponible en ebook mais aussi en broché, je touche sans problème un plus grand panel de lecteurs, car nombreux sont ceux dans le domaine de la fantasy qui sont sentimentalement très attachés au papier. Actuellement, j’ai d’ailleurs plus de ventes sur ce support qu’en numérique.

Mes projets
Humblement, je n’ai pas la prétention de devenir célèbre, juste de faire partager mon univers, que celui-ci plaise ou non. Si cela arrive, merci aux lecteurs, aux amis et au destin ! Je m’étais toujours dit que j’assumerais de me dire « écrivain » lorsqu’une personne achèterait mon livre et le lirait : c’est chose faite.
Je ne peux cesser d’écrire, donc d’autres romans suivront, toujours en indé. Le tome 2 des Pèlerins d’Yssel, « Les Vengeurs », est prévu pour juin 2013. Le tome 3, en cours de rédaction, devrait sortir un an plus tard. J’ai également un projet de lexique illustré du monde d’Adir afin de permettre au lecteur de s’y retrouver dans cet univers foisonnant ; ce serait une collaboration avec l’illustrateur Ronnie Bella.
Enfin, j’ai décidé de réécrire mon premier roman (celui qui m’a aidée à continuer après la mort de mon père), probablement sous un autre nom. Je vais aussi reprendre de courtes histoires déjà rédigées ou partiellement élaborées, afin qu’elles collent mieux à mon style actuel ; elles seront rassemblées sous le terme de « Chroniques ».

Mes remerciements
Merci à Vincent, mon bien-aimé, à ma famille et aux Anges qui nous entourent.
Merci à mes amis, mes premiers lecteurs, et à tous les autres curieux qui oseront se plonger dans mes mots et mes pages.
Merci à Eva Liebermann, ma sœur d’âme, qui m’a accompagnée et poussée plus loin dans cette aventure humaine ; c’est notamment grâce à elle que cet entretien a pu se faire.
Merci à vous, Laurent, pour votre accueil et votre bienveillance.

À tous et à toutes je vous souhaite sincèrement le meilleur.

Vous pouvez suivre l’avancée de mes travaux et découvrir mes autres projets créatifs sur mon blog.


21 février 2013

Un auteur indépendant se présente : Jacques Vandroux


La rubrique « Un auteur indépendant se présente » est un espace d’expression et de visibilité pour tout auteur indé qui le souhaite. Ici, chacun a carte blanche pour parler de ses œuvres, de son univers, de son parcours, de ses projets, et de l’édition indé.
De ça et du reste, puisque l'indépendance, c'est la liberté.
Merci à Jacques Vandroux pour sa contribution.

© Jacques Vandroux
Jacques Vandroux est un nouvel arrivant dans le monde des auteurs. Il est né sur la Toile le 25 février 2012, en proposant sur Amazon une nouvelle, Multiplication. Fils de l’imagination de l’auteur et de la prise en main du monde de l’édition numérique par son épouse, il récidive au mois d’avril 2012 avec cette fois-ci un roman-fleuve, Les Pierres couchées. Huit mille livres vendus plus tard, Jacques Vandroux accepte avec grand plaisir de venir s’exprimer sur le site Écran total pour présenter sa trajectoire d’auteur indépendant.

Pourquoi écrire ?
La réponse est très simple : parce que j’aime raconter des histoires, et aussi parce que j’aime que l’on m’en raconte. Quand j’ai écrit Les Pierres couchées, j’ai été mon premier lecteur. La configuration idéale ! J’avais lu dans une revue que tout auteur devait avoir un squelette structuré de son roman avant de l’attaquer. J’ai été un très mauvais élève, n’ayant aucune idée de l’histoire qui allait naître quand j’ai écrit le premier chapitre. Pour tout avouer, je ne savais même pas s’il y en aurait un deuxième. Puis peu à peu, je me suis laissé happer par le scénario et par les personnages auxquels j’avais donné vie. Quelques lecteurs m’ont encouragé à persévérer… et trois ans plus tard, j’ai écrit le mot fin.

Trois ans pour écrire un roman
Je travaille dans le monde industriel, et écrire est un passe-temps que je ne m’accorde que sur mes heures de repos ou lors de longs déplacements professionnels. Ce qui me force à abandonner parfois des semaines entières mes parchemins, ou plutôt mon fichier Word (ça a quand même moins de charme). Cela étant écrit, j’ai cru avec la naïveté du débutant que tout serait terminé quand j’ai écrit le mot fin. Grave erreur !

Comment en suis-je arrivé à l’auto-édition ?
Au tout début, grâce à une amie, qui est aussi le genre de lectrice qui flatte l’ego de l’auteur : « Jacques, je t’assure, il faut ab-so-lu-ment que tu édites ce livre ! » Elle avait vu l’intervention de David Forrest sur l’auto-édition, lors d’une émission télévisée. Ensuite, grâce à mon épouse, qui en plus de son activité professionnelle a tenu le rôle d’agent littéraire, de correctrice, d’informaticienne, d’animatrice de blog et de responsable administrative.
Au passage, je mets au défi quiconque n’a jamais trempé dans ce milieu de comprendre comment s’acquitter des charges sociales sans risquer la crise de nerfs. Eh oui, dès le premier euro gagné, il faut penser à ce genre de détail. Nous avons découvert toutes ces facettes du métier au fur et à mesure, au cours des mois qui ont suivi la mise en ligne des romans.

D’où l’erreur ?
Exactement. Dans l’enthousiasme du moment, nous avons déposé un fichier en format pdf. La plateforme Amazon est vraiment d’accès très simple. Émotion au moment de la première vente, même si votre meilleur pote vous a appelé une heure avant pour vous dire qu’il allait acheter votre livre. Puis une seconde vente, et quelques dizaines. Des inconnus ont donc acquis votre œuvre : immense fierté ! Les deux premiers commentaires largement étoilés qui font bomber le torse, puis, patatras, le commentaire « une étoile » qui déprime l’écrivain et sa femme : orthographe désastreuse et coquilles sont mises en avant, dans un style en général peu amène… Eh oui, voilà l’erreur ! Les deux lectures de votre roman de plusieurs centaines de pages n’ont pas suffi, et le client demande, à juste titre, la même orthographe que celle proposée par un éditeur traditionnel. Il aura fallu plusieurs relectures et l’aide précieuse de volontaires à la grammaire incorruptible pour finaliser une version digne de l’attente du public.

Mes thèmes de prédilection
J’aime écrire des romans divertissants. J’aimerais parfois me lancer dans de grandes introspections, mais je m’en sens incapable. Un commentaire qui se voulait acerbe a comparé Les Pierres couchées à un roman de gare. Voilà, tout est là ! Imaginez le livre que vous auriez envie de lire quand vous êtes tranquillement assis dans le train : vous avez plusieurs heures devant vous, un grand paquet de M&Ms ou de chips à vos côtés, et vous voulez vous vider la tête. Écrire ce livre, c’est mon objectif ! De l’action, du dépaysement, des personnages auxquels on s’attache, un brin de fantastique. Ce sont les ingrédients qui ont parsemé l’écriture des Pierres couchées et de Multiplication. Avec Au cœur du solstice, mon nouveau roman qui aurait du sortir depuis trois mois déjà – mais qui arrivera dans les bacs numériques d’ici quelques jours –, j’ai écrit un polar plus sombre que les autres. Les ingrédients sont toutefois restés les mêmes.
En parallèle, une histoire pour enfants devrait voir le jour sous peu.
En fait, les idées ne manquent pas, mais le temps si ! Heureusement que nous sommes à deux pour mener à bien cette aventure.

Livre papier ou livre numérique ?
Personnellement, je suis plutôt attiré par le papier. L’ancienne école ? Sans doute, diraient mes enfants. Mais le livre numérique est vraiment pratique… et léger. Il permet aussi de proposer des œuvres à des prix très attractifs et de toucher un public qui n’aurait pas tenté, ou pas eu les moyens, de vous lire à un prix classique.
Au passage, nous avons travaillé avec Syllabaire, un éditeur numérique pour les plates-formes de distribution autres qu’Amazon. Nous avons aussi utilisé la plateforme CreateSpace pour proposer une version papier de nos livres (qui doit, entre nous, représenter moins d’un pour cent du total des ventes).

Et si un éditeur ayant pignon sur rue me contactait ?
Je serais surpris : jour après jour, au gré du succès des Pierres couchées, sur Amazon, j’ai attendu sa lettre. Mais elle n’est pas venue !
Plaisanterie mise à part, l’auto-édition donne beaucoup de liberté et de sel à l’aventure : on ne doit rien à personne. Mais si le facteur apportait un jour cette fameuse lettre, je pense que je serais flatté, et que nous ne laisserions certainement pas passer cette opportunité.


Pour plus d’information sur Jacques Vandroux, consultez sa page auteur.
Et pour plus d’informations sur le monde selon Jacques, consultez son blog.